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m comme martha

11 décembre 2010

Laissant derrière elle trois portes bien closes,

 

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Laissant derrière elle trois portes bien closes, elle descendit doucement l'escalier. Ses trois enfants étaient couchés et sur le point de s'endormir, peut-être même déjà assoupis. Des enfants lavés, coiffés, en pyjama, aux leçons sues et aux vêtements du lendemain rangés au pied du lit. Elle eut le sentiment du devoir accompli. Ses épaules voûtées se redressèrent.

21h01. C’était l’heure de tous les possibles. La soirée non entamée se déployait devant elle, les heures du soir lui appartenaient. Elle s’accorda sans culpabilité deux carrés de chocolat, mais la tablette entière y passa.

Elle se pencha vers la table du salon et approcha d’elle son ordinateur portable. Il sortit de sa veille quand elle bougea le pavé numérique. Elle ouvrit ses favoris et cliqua sur bloglines. En voyant les dizaines de titres de blogs en gras, elle eut un frémissement et cliqua sur le premier. Elle parcourut en diagonale le contenu du billet, survola la photo et cliqua sur la deuxième ligne en gras. Elle se fit la remarque qu'elle n'avait pas laissé de commentaire chez cette blogueuse depuis une semaine et que, si elle voulait la conserver comme lectrice et amie, elle devait consentir à faire quelques efforts. Elle s'extasia donc sur un béguin pour nouveau-né en liberty, n'oublia ni le vocabulaire hyperbolique, ni le smiley qui laissait deviner aux autres lectrices une forme de complicité, ni les points d'exclamation d'usage.

Elle cliquait sur la cinquième ligne en gras quand elle entendit son ordinateur lui signaler qu'elle avait reçu un mail. Elle l'ouvrit toutes affaires cessantes et découvrit un message de la blogueuse au béguin, la remerciant de son chaleureux compliment et lui souhaitant une douce soirée. Elle avait déjà oubliée ce commentaire et cette intrusion dans sa boîte mail la perturbait un peu. C'était un peu comme si on était entré chez elle par effraction. 

 

 

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4 novembre 2010

Elle a dévissé le couvercle du pot neuf. Le


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Elle a dévissé le couvercle du pot neuf. Le plastique blanc a crissé contre l'opercule doré.

Elle a ouvert le tiroir à couverts, a choisi une grande cuillère, l'a prise à l'envers et a transpercé d'un coup brusque la mince feuille d'aluminium constellée de myriades d'éperons agressifs. Le soleil s'est un peu déchiré. 

Selon un cérémonial bien établi, elle a ensuite pris le pot à pleines mains, a calé le manche de la cuillère contre le bord et s'est appliquée à en parcourir le tour au plus près.

L'opercule s'est détaché, laissant voir son ventre argenté et découvrant la fameuse pâte marron. 


31 octobre 2010

Devait-elle le remercier ou pas ? Si elle le

DSC_0003Devait-elle le remercier ou pas ?

Si elle le remerciait, elle reconnaissait que donner le bain à Angelo était une tâche qui lui revenait tacitement et qu'elle lui était reconnaissante de l'en décharger. Si elle ne le remerciait pas, il allait penser qu'elle était une ingrate incapable de percevoir ses efforts et ne les renouvellerait donc pas.

D'un autre côté, là, au moins, elle était tranquille. Enfin, tranquille à préparer le dîner. Et puis, de son livre sur la manipulation honnête, elle avait retenu qu’il fallait remercier les gens pour les encourager à agir librement de la manière souhaitée. C’était quand même ça l’idée, qu’il ne donne pas qu’une seule fois le bain à Angelo.

-  Pourquoi tu me remercies ?

-  Pour rien, juste comme ça. C'est bien quand c’est toi qui lui donnes le bain.

- Oui, et c’est trop rare, c’est ça que tu veux dire ? Ca alors, ce que tu peux être pénible à toujours chercher des histoires !


 

31 octobre 2010

Lui revint en mémoire ce groupe de Japonais qui,


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Lui revint en mémoire ce groupe de Japonais qui, à peine arrivés devant le Sacré Coeur,  se rassemblaient déjà pour la photo de groupe. Sans s'autoriser un regard sur le monument auquel ils tournaient le dos, ils prenaient mécaniquement la pose. Ensemble d'abord, puis un par un, crispaient leur sourire en fixant le photographe. 

Plus soucieux de détenir une preuve de leur passage à Montmartre que d'en garder un souvenir, ils disparaissaient ensuite vers un autre décor. 

Elle pensa que son blog aussi faussait sa vie. Il témoignait furieusement de son bonheur, avec trop d'aplomb, de force ou de naïveté. Il clamait qu'elle était heureuse et le démontrait par l'addition de ses menues joies quotidiennes, scrupuleusement consignées avec force photos à l'appui.

Il l'empêchait de se plonger dans l'instant car il se voulait vestige de moments vécus. De moments qu'elle vivait finalement à peine, déjà engourdis de la conscience de leur nécessaire souvenir.

 

 

 

 

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